5 ans après, la mère des trois enfants noyés à Chalon, lance un appel au secours

C’est une mère totalement meurtrie qui témoignait, en octobre 2022, au micro des journalistes de France 3 Bourgogne, la tragédie qui a frappé sa famille. « J'ai accepté de vous parler parce que je sais que si je ne m'exprime pas, mon histoire sera jetée aux oubliettes et je n'obtiendrai jamais justice. » Les larmes aux yeux, Lallia Konaté a raconté comment elle a perdu trois de ses enfants, retrouvés noyés au Lac des Prés-Saint-Jean à Chalon-sur-Saone.

La vie de Lallia Konaté a basculé le 8 juillet 2018. En week-end chez leur père, ses cinq enfants s’amusaient au lac des Prés-Saint-Jean, accompagnés de leur belle-mère. Mais cette dernière s’étant un peu éloignée et ayant autorisé les enfants à jouer dans l’eau, deux des enfants de Lallia, Assia, 9 ans et Abd-Allah, 10 ans, s’y sont aventurés, ne sachant pas nager. Surpris par la pente abrupte du lac, les deux enfants coulent. Leur grand frère de 13 ans, Abd-Arrahmane, tente de les secourir mais coule à son tour. Tout ça sous les yeux de leurs deux autres soeurs, impuissantes. Les trois enfants seront repêchés plus d’une heure après par les secours. Malheureusement trop tard pour les sauver.

Elles ont vu leurs frères et sœur mourir. Personne ne peut vivre avec ça. Aujourd'hui, c'est la double peine. Je perds trois enfants, et les deux filles qui me restent sont traumatisées à vies. On est toutes les trois atteintes de choc post-traumatique.

Chez elle au moment du drame, Lallia est contactée par son frère qui l’informe de la présence d’ambulances au Lac. Inquiète elle s’y rend avec une amie où elle découvre ses deux garçons allongés sans savoir ce qui s’est réellement passé. Transportés en urgence, c’est à l’hôpital qu’on lui annonce le décès d’Abd-Arrahmane, Abd-Allah et Assia. « Je me souviendrai toute ma vie du moment où ils m'ont conduit à mes enfants. Je les ai vus, allongés, comme s'ils dormaient. Mais quand je pose ma tête sur le torse de mon fils, il n'y avait pas de battement de cœur. Et là je comprends que c'est vrai. Que mes enfants sont décédés. »

La peine est indescriptible pour cette jeune mère de famille. Elle accuse la compagne de son ex-mari de négligence en ayant autorisé les enfants à se baigner dans ce Lac pourtant réputé comme sale et dangereux. Le maire, aussi, aurait sa part de responsabilité car « il n'y avait pas de panneau d'interdiction de baignade, même si tout le monde savait que le lac était dangereux. Le maire a attendu plus d'un an pour faire installer ces panneaux après le drame. »
En mai 2020, Lallia porte plainte contre le maire de Chalon-sur-Saône, Gilles Platret (LR). La belle-mère, quant à elle, est mise en examen pour homicide involontaire depuis 2019 et est laissée en liberté. Au bout de 4 longues années d’attente, une date de procès est enfin fixée au 28 octobre 2022, mais finalement reportée en 2023.
« On nous laisse dans l'agonie, dans la souffrance. J'ai deux enfants qui ne se reconstruisent pas et qui me demandent : pourquoi il ne se passe rien ? », déplorait Lallia.

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Devant le silence de la justice, ses proches et ses amis l'ont encouragée pendant des années à s’exprimer sur les réseaux sociaux, pour mobiliser l’opinion et faire avancer les choses. Puis grâce à une femme qu'elle ne connaissait pas, Lallia a su trouver la force de témoigner face caméra, à travers les médias et d’organiser des marches blanches. Depuis, avec ses deux filles, elle a quitté la France pour s’installer à Manchester, et mène ce combat pour sa famille, pour se reconstruire face à cette douleur et pour obtenir justice.
« Chaque recoin de Chalon me rappelle mes enfants. Je pensais qu'en quittant la ville, ça irait un peu mieux. Mais en fait, non. […] J'ai cru en cette justice pendant quatre ans. Mon avocat a fait des relances tout le temps. À chaque fois, on nous balade »

Malheureusement, ce n’est pas la première fois que nous entendons un tel discours. Beaucoup de victimes font face à une justice lente, indifférente à leur douleur, au travail parfois bâclé, les laissant livrées à elles-mêmes. Lallia a attendu ce procès pendant 4 ans, pour le voir reporté à ce mois-ci, semblerait-il, au Tribunal de Grande Instance de Chalon sur Saône. Une attente pesante. Même si rien ne saurait réellement apaiser cette douleur constante pour Lallia et ses deux filles.

Nous savons du reste que « l'Eternel fait droit au misérable, Justice aux indigents. » [Psaumes 140 v. 12]. Telle est notre prière pour Lallia et ses deux filles. Que leur souffrance soit enfin reconnue et écoutée ! De même pour toutes les victimes d’un système injuste, partial, discriminatoire et surtout indifférent.
Ce dimanche 12 mars 2023, de 14h à 17h, se tiendra un rassemblement, organisé par le collectif Justice enfants Lallia, en présence de différents intervenants, Assa Traoré, la famille d’Alassane Sangare ainsi que du petit Yanis et Khadija. Car le combat pour la justice nous concerne tous.

La Rédaction

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