Une exhortation écrite par Yannick NILA

Voici un sujet particulièrement houleux pour bon nombre d’entre nous franchissant la porte de l’indépendance ; ou du moins tentant de la franchir. C’est un chemin, par sa part, semé de douloureuses embûches. Douloureuses davantage car elles impliquent les liens sacrés de la famille. De nombreux cas et de nombreuses cultures sont observés ; toutefois le monde clame à l’unisson l’importance de couper le cordon ! Mais la réalité est toute autre. Lorsque certains enfants s’accrochent ad vitam aeternam aux jupons de maman, d’autres peinent à y échapper.

La raison voudrait que l’enfant, une fois majeur ou à quelques années près, soit en mesure de prendre soin de lui-même, de poser ses proches choix, de suivre ses passions, en somme d’être indépendant. Un mot qui fait bourdonner les oreilles de moult parents, animés de cette peur d’être relégués au second plan, voire au dernier, dans la vie de leurs enfants. Et pourtant !
C’est aux parents qu’incombe la tâche d’accompagner l’enfant à l’indépendance, à la maturité, qui peut bien entendu s’acquérir au travers d’erreurs et d’échecs. Aux parents de soutenir les choix de leurs enfants même s’ils ne leur conviennent pas forcément. A eux de développer l’écoute et le conseil sans imposer leur point de vue. Et quand bien même ils seraient persuadés que l’enfant emprunte une mauvaise voie, le confronter violemment peut, à défaut de le raisonner, le pousser plus vite vers la sortie et la rébellion. Tandis que certains parents mènent cette rude tâche avec brio, d’autres sont pris au piège du conflit débouchant sur une relation toxique, mêlée de jalousie et d’oppositions constantes.

Beaucoup l’on très certainement vécu, suivre cette règle qui dit qu’il appartient à l’enfant d’obéir coûte que coûte. « Même la Bible le dit ! », clament certains parents. Sûrement se basent-ils sur ce doux verset : « Enfants, obéissez à vos parents, selon le Seigneur, car cela est juste. Honore ton père et mère, afin que tu sois heureux et que tu vives longtemps sur la terre. » [Ephésiens 6 v.1-3]. Mais voilà, il ne s’arrête pas là ; « Et vous, pères, n’irritez pas vos enfants, mais élevez-les en les corrigeant et en les instruisant selon le Seigneur » [Ephésiens 6 v.4]. Nous soulignerons que le devoir des enfants comme des parents doit s’appliquer « selon le Seigneur ». Pour autant, ceci n’est pas toujours le cas, et génère par conséquent de nombreux conflits. De part et d’autres.

Une rupture familiale pour un salut

Dieu dira : « je suis venu mettre la division entre la fille et sa mère » [Matthieu 10 v.35]. Quoi ! Dieu ne sépare jamais les familles ! Mais il est important de comprendre le contexte et de quelle séparation il est question. Car nous sommes d’accord que lorsque les parents s’affichent, parfois sans le savoir eux-mêmes, comme des freins à l’épanouissement de leurs enfants, il est important d’agir !
Voici le témoignage de Sophie, 37 ans, recueilli par le magazine L’Express.

J'ai toujours eu des relations très compliquées avec ma mère. Depuis toute petite, elle trouve à redire sur mes décisions. Mes compagnons n'ont jamais été 'assez bien' pour moi, mes études de lettres ne 'menaient à rien' et mon emploi actuel dans l'édition est 'précaire et mal payé'. Bon gré mal gré, j'en ai longtemps pris mon parti, mettant ses réflexions sur le compte d'un perfectionnisme exacerbé. Je faisais avec, mais nous avions régulièrement des disputes extrêmement fortes.
À chaque fois que j'allais voir ma mère, j'en ressortais déprimée, alors que j'allais globalement plutôt bien. Elle passait son temps à me juger et à souligner mes imperfections. Constater que je n'avais plus 'besoin' d'elle semblait la plonger dans un profond désarroi. J'ai réalisé que c'était cet équilibre qu'elle ne pouvait pas supporter, elle qui a toujours eu un tempérament mélancolique, prompt à la déprime.

Tensions sur tensions, discussions infructueuses, Sophie reconnut que sa mère « était un obstacle à son bonheur » et décida de couper les ponts.
« Aujourd'hui, après huit mois de silence sans répondre ni à ses textos ni à ses appels, j'oscille entre soulagement et culpabilité. Elle me manque mais je ne peux m'empêcher de me dire que cette rupture était inévitable. »

Selon Marie Andersen, psychologue et auteure, il est inévitable pour une jeune femme de rompre avec sa mère lorsque cette dernière devient toxique et empoisonne la vie de son enfant. « Rompre, c’est alors se sauver soi-même, pour ne pas sacrifier son existence à une pseudo loyauté filiale devenue délétère ». Des mots qui peuvent paraître durs pour certains ; pourtant, il est digne de se demander s’il vaut la peine de vivre dans la culpabilité, le stress de plaire à ses parents, alors que ceux-ci persistent à refuser catégoriquement le mode de vie, les choix et l’indépendance de leurs enfants ? Est-ce juste de sacrifier son bonheur et son épanouissement parce que maman refuse de me comprendre ? Or sachons, que maman ou papa, d’ailleurs, a eu sa vie, son parcours, ses échecs, ses erreurs. Maman a son âme, ses propres désirs, ses propres valeurs. Et nous ne devons calquer nos vies sur celles de nos parents, mais mener la nôtre, encore mieux selon le Seigneur ! Au risque que cela leur déplaise ; Car nul ne maîtrise l’action de Dieu.

Mettons-nous également à la place de ces parents, effrayés de voir leurs enfants voler de leurs propres ailes, effrayés à l’idée qu’ils vont devoir affronter cette vie coriace. Mais à force de surprotéger nous pouvons détruire. N’ayez crainte, mais plutôt ayez foi en l’éducation et l’instruction que vous aurez inculquées à vos enfants. Nous sommes une âme à part entière, dont le salut est individuel, et pour qui Dieu a un destin tout tracé. Chaque enfant est le projet de Dieu. Et pour clore tout débat et ôter toute culpabilité, Dieu dira : « Ma mère et mes frères, ce sont ceux qui écoutent la parole de Dieu, et qui la mettent en pratique. » [Luc 8 v.21].
Soyons du bon côté de la barrière. Il ne nous est guère demandé de renier nos parents, mais bien de les honorer. Selon le Seigneur ! Pour cela, sortons des filets familiaux, coupons le cordon, et honorons par un avenir radieux tracé dans le plan de Dieu.

Audrey Wolber

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