Etudiants le jour, SDF la nuit

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Une exhortation écrite par Yannick NILA

Encore tarie dans l’ombre il n’y a pas si longtemps, c’est au grand jour que la situation de plusieurs élèves du lycée Auguste Blanqui à Saint-Ouen vient d’être révélée. De quoi ternir la réactivité et le fonctionnement des pouvoirs publics.

Elle a pris son courage à deux mains, épaulée par sa professeure d’anglais, Clémence Touboul et l’un de ses camarades de classe, et s’est livrée à France Info. Elle se nomme Marie (nom d’emprunt, Ndlr) et pour la première fois, a révélé les conditions déplorables dans lesquelles elle vit, avec sa mère et sa soeur de 17 ans.
Marie a 18 ans et est en classe de terminale. Arrivée en France il y a sept ans, elle roucoulait des jours normaux avec sa mère et sa soeur, dans un logement de fonction, jusqu’au jour où sa mère a été renvoyée et sommée de quitter les lieux. Durant onze mois, les trois jeunes femmes seront hébergées chez une tante. “C’était loin: tous les jours je me réveillais à 5h pour venir au lycée. J’avais deux heures de trajet, mais je me disais que j’avais un logement, que je pouvais dormir. En novembre, ma tante nous a dit qu’elle ne pouvait plus nous prendre en charge, qu’on devait quitter le logement. C’est là que tout a commencé”.

Joignant le 115, numéro d’hébergement d’urgence, elles parviennent à être hébergées un week-end, mais dès le lundi, plus de place, le 115 saturé. Elles se retrouvent à la rue, en plein hiver au mois de novembre 2016. Un cauchemar qui va durer dix jours consécutifs. Alors que la nuit venue, elles se blottissaient les unes contre les autres dans des Abribus, des parkings, ou encore une gare de la région parisienne, la journée, Marie peinait à suivre les cours. “C’était impossible pour moi de travailler, je n’arrivais vraiment pas à suivre. J’ai raté beaucoup de contrôles. C’était vraiment compliqué. La nuit je dormais pas. Du tout. Je dormais en cours.”, témoigne la jeune fille. Une double vie qu’elle gardera secrète, vécue comme une honte. Et pourtant dans son lycée qui recense quelque 1000 élèves, cinq autres camarades, comme elle, subissent le même sort. Mais qui aurait pu le savoir?
Marie mit du temps pour se confier à qui que ce soit. Seule l’assistante sociale du lycée était dans la confidence depuis un an, lorsqu’elle était encore chez sa tante. Proche de Marie, l’assistante sociale prenait de ses nouvelles chaque soir et lui mettait à disposition l’infirmerie, chaque matin, pour qu’elle puisse faire sa toilette.
C’est d’ailleurs elle qui alerta les professeurs. Entre-temps, Marie est parvenue à se confier à quelques amis de sa classe.
En effet, nul ne s’en sort tout seul, dans cette vie. Ainsi la parole de Dieu nous exhortera à porter les fardeaux les uns des autres, et nous accomplirons, par-là, la loi du Christ [Galates 6 v.2].

Une mobilisation inespérée

Dès lors appliqué, l’amour du prochain se révèle parfois de manière inespérée. Comment rester insensible à une telle situation ? Il n’en serait qu’un coeur de pierre. La Bible nous dit par ailleurs que l’“homme dont le regard est bienveillant sera béni, parce qu’il donne de son pain au pauvre” [Proverbes 22 v.9]. C’est ainsi que professeurs et élèves ont uni leurs biens pour porter secours à Marie et sa famille. Au lycée une enveloppe de billets circule; sur Internet une cagnotte est créée. Jusqu’au 28 décembre Marie, sa soeur et sa mère ont été logées dans un appartement trouvé et loué par le corps enseignant. Puis cinq jours, ailleurs. Et depuis début janvier jusqu'au 21 février, la famille a la grâce d’être hébergée dans le studio d’une personne partie en voyage. Tout cela financé par l’argent récolté. Du mieux qu’ils ont pu, l’aide a été apportée. Mais le corps enseignant reconnaît ses limites et interpella le 10 décembre dernier, les pouvoirs publics, par une lettre ouverte. Ne supportant plus que leurs élèves se retrouvent à la rue. Depuis lors, le dossier de logement de Marie est en cours d’examen à la préfecture de Seine-Saint-Denis, tout comme celui des autres familles. Mais ce sujet souleva l’émoi parmi les professeurs du lycée qui appellent à manifester devant la mairie de Saint-Ouen, le jeudi 12 janvier à partir de 18h. Car outre Marie et ses camarades, la France compte de nombreux élèves sans-abri. L’Insee comptabilisait en 2012, basé sur les bénéficiaires des centres d’hébergement et de distributions de repas, 31 000 enfants sans domicile, ajoutés aux 81 000 SDF adultes.
Portant égard à tous ces sans-abri acculés par les déboires de cette vie, nos prières s’élèvent, également, pour que l’Etat puisse pallier urgemment cette affreuse situation.

Un courage exemplaire

“Ce qui est impressionnant, c'est que ces élèves ne lâchent pas le morceau. Ils ont quand même envie d'avancer et de réussir. Ils ont cette force-là, et c'est ça qui donne l'énergie de continuer. On apprend à leur contact, c'est complètement fou, insiste de son côté la professeure d'anglais. On se dit : 'combien d'élèves sont passés par là sans qu'on ne le sache ?' Donc c'est tout à ton honneur, Marie, de t'être manifestée, d'en avoir parlé à des adultes.”

Ils sont jeunes, et survivent dans une précarité extrême. Mais rien ne les détourne de leur but, de leur espoir pour l’avenir. Devenue une motivation à chaque réveil. C’est une foi exemplaire.
Comme le souligne l’apôtre Paul, il nous faut une bonne perspective au milieu des difficultés. Du fait de ne point considérer le problème présent et passager mais se focaliser sur la récompense de notre persévérance. Ainsi de chaque douleur, nous en tirons une force morale et spirituelle. C’est pourquoi nous ne perdons pas courage [2 Corinthiens 4 v.16].

La Rédaction

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